Flamme Rouge

Quand j’étais gamin, dans ma banlieue pavillonnaire, chaque année au moment de Roland Garros tous les rejetons du quartier sortaient les raquettes et allaient frapper des grands coups de balle de tennis sur le pignon des maisons de voisins mécontents. Et en juillet, pendant le tour de France, on voyait déferler les bicyclettes.

Si comme moi le caleçon moulant ne vous sied pas trop, que vous préférez garder vos beaux mollets velus et que finalement la selle vous fait souffrir l’entre-jambes, il vous reste cette nostalgie. Et Flamme Rouge.
Jeu de société d’Asger Granerud, un auteur danois passionné de courses de vélo, Flamme Rouge est sorti à l’origine en 2015 chez l’éditeur finlandais Lautapelit, et est disponible pour nos familles de 2 à 4 joueurs grâce à Gigamic qui l’a traduit et le distribue en France.

Mais voyons plutôt pourquoi c’est bien.

D’abord parce que ce n’est pas un jeu de simulation.
L’idée de ce jeu de course est bien de nous faire revivre les folles embardées de la petite reine, de nous faire rejouer les tactiques d’une vraie course cycliste, mais sous un angle résolument simple et familial. Tout tient en trois ou quatre mécanismes très simples à prendre en main.
Deux cyclistes par joueur, un sprinteur et un rouleur.
Un paquet de cartes différentes pour chacun. Et c’est le coup de feu !
Comme en vrai, les cyclistes sont d’abord groupés dans un gros peloton jusqu’à ce que l’un d’entre eux, ou un groupe coordonné, se décide à faire une échappée… et qu’il y parvienne, car ce n’est pas si facile de se détacher de ce groupe de cyclistes qui ne pensent qu’à vous sucer la roue.

Aspiration, relief, efforts, fatigue. Tout est géré très simplement par le jeu.
Peloton, échappées, relais, défaillances. Priorité à l’amusement.
Chez nous Flamme Rouge remporte un grand succès auprès de trois générations de joueurs. De mon plus jeune enfant jusqu’à ses grands-parents, il a su séduire tous les âges.

Ensuite parce que c’est pas non plus le jeu de l’oie.
J’ai dit que ce n’était pas un jeu de simulation, et c’est vrai – vous n’aurez pas à gérer la pression des pneus, le niveau d’eau dans les gourdes et les bakchichs pour éviter le petit contrôle de fin d’étape. Mais pour autant il ne s’agit pas de faire n’importe quoi.

Il faut coordonner le déplacement de ses propres cyclistes, ou bien collaborer avec un adversaire. Car comme dans une vraie course, il est important de se relayer en tête de groupe pour ne pas fatiguer excessivement ses champions.

Pour matérialiser ça, le jeu distribue des cartes fatigue qui viennent pourrir la pioche des cyclistes qui caracolent bille en tête.

A l’inverse, rester en queue de peloton signifie qu’il faudra jouer de très grosses cartes pour réussir à faire une échappée. Attention donc à monter en embuscade avant d’attaquer.

Enfin il faut garder ses meilleures cartes, mais aussi les plus mauvaises, pour les jouer au moment opportun. Les parcours sont constitués de tuiles emboîtables façon puzzle et il est possible de créer un grand nombre de circuits différents.
La première chose à faire dans une partie de Flamme Rouge est de repérer les reliefs. L’idéal est d’essayer de garder ses cartes puissantes pour les longues sections de plat, ses cartes moyennes pour les montées où de toute façon la vitesse est limitée, et ses mauvaises cartes pour les descente où on avance sans se fatiguer.
Bien sûr cette stratégie sera soumise au hasard du tirage (c’est un jeu familial plein de rebondissement), et de toute façon ça dépend du caractère des joueurs autour de la table.

Voilà le genre de main que vous finirez par piocher si vous faites n’importe quoi.

Enfin parce que le jeu prend une toute autre dimension dès lors qu’on enchaîne plusieurs étapes.
Un système un peu alambiqué permet d’exprimer le retard de chaque cycliste, en minutes et en secondes, suivant le nombre de cases et de tours de jeux qui le sépare du premier arrivé. En outre un certain nombre de cartes fatigues sont conservées pour les courses suivantes.
Ces deux petites choses changent énormément la tactique de chaque course et l’attention qu’on portera spécifiquement à celui de nos cyclistes qui figure le plus haut dans le classement.

Heureusement le monde du jeu regorge de brillants passionnés. (Ok… des geeks.)
Grâce à un certain Benoît Gourdin vous pouvez télécharger une application sur votre smartphone pour gérer les fins d’étapes, le retard, le classement, les cartes fatigues à conserver. Tout ce qui serait un peu fastidieux dans ces parties en plusieurs étapes, et qui se fait avec le plus grand naturel grâce à l’application. Je ne suis pas du genre à vanter les mérites d’un bidule numérique mais là c’est bluffant.
https://www.benoitgourdin.fr/flamme-rouge-companion/

Gloire aussi à Ryan Keane, ce fan américain qui a modélisé les 21 étapes du Tour de France 2018 en parcours de Flamme Rouge, selon les reliefs, les distances etc.
https://boardgamegeek.com/geeklist/239543/flamme-rouge-tour-de-france-2018

Pour toutes ces raisons mais surtout pour les bons moments passés en famille, les rigolades et les mésaventures du petit dernier qui part toujours à fond les ballons, Flamme Rouge est un de nos jeux familiaux préférés. Malgré des règles simples, le jeu réussit à reproduire certains aspects tactiques d’une vraie course cycliste. Les stratégies peuvent varier selon les parcours et le tempérament des joueurs. Souvent les échappées flamboyantes marquent les esprits. Parfois même, le panache paye.

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10 commentaires sur “Flamme Rouge

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    1. Effectivement deux extensions sont disponibles pour enrichir ce jeu :
      – la première, « Peloton », ajoute un mode solo, un binôme de cyclistes géré par un paquet de cartes « automatisé » pour grossir le peloton surtout quand on joue à 2 ou 3 joueurs, quelques tuiles supplémentaires pour ajouter des voies pavés étroites et d’autres très larges ainsi que 2 nouvelles paires de cyclistes pour les parties à 5 ou 6 joueurs. Je possède cette extension mais je me fiche complètement des trois quarts de ce qu’elle propose. Je l’ai achetée pour pouvoir jouer à Flamme Rouge à plus de 4 joueurs. Avec les grands-parents, les enfants et nous.
      – la seconde, « Météo », ajoute… je ne sais même pas vraiment ce qu’elle ajoute. Des machins qui viennent perturber la météo ?

      Vraiment à mon avis ce qui fait passer le jeu dans une autre dimension, c’est ce système de courses par étapes. Jouable sans l’application mentionnée dans l’article, mais c’est tellement mieux et plus simple avec.
      Bien plus riche que n’importe laquelle des deux extensions, et gratuit.

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  1. Hében dis donc, je serais presque tenté d’y jouer suite à ton article.
    Il faut savoir que le tour de france était pour moi (et sans doute pour d’autres) synonyme d’une tragédie annuelle bis-répetita : la disparition du Club Dorothée (ou récré A2 je sais plus… de dessins animés japonais en tous cas).
    Que de mauvais souvenirs : on troquait Captain’Flam et ce malheureux Rémy sans famille contre une bande de mecs qui pédalaient, pédalaient et pédalaient toute la journée.
    Et moi, tous les jours j’attendais impatiemment devant mon poste TV que l’on me remette ma dose qui ne venait jamais.
    Je n’avais alors pas connaissance de l’existence du programme TV et NetFlix n’était pas encore dans les tuyaux. La guigne quoi.
    Tout ça pour dire que ça a l’air vachement chouette en fait. Merci l’ami Payo !

    Aimé par 1 personne

    1. Cher Bast,
      Moi non plus je ne peux pas blairer ces conneries. Il paraît que les paysages sont beaux et que les commentaires font découvrir la France. Je crois qu’on commence à être vraiment trop vieux quand on ne se rend plus compte que tout ça c’est pour nous vendre des drones et nous faire bouffer du Wikipédia.

      Sinon ouais Rémi c’était bien mais j’aurais pas voulu le fréquenter dans la vie. La poisse, tout le monde meurt.

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  2. Must have, meme si « je sais pas quoi faire de mon rouleur »….
    Simple, efficace, renouvelable à l’infini. Bien vendu, bien que déjà dans la ludothèque 😁

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    1. Cher Anonyme,
      Cette phrase entre guillemets me pose une colle. Je ne peux me résoudre à la prendre au premier degré… déjà des heures que je cherche un jeu de mots ou une contrepèterie.
      Non, vraiment. Parce qu’au premier degré ce n’est pas possible : essayez une course de montagne et votre rouleur, plus régulier que le sprinteur, se transformera en grimpeur.

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  3. mon père était fan de courses cyclistes, et dans ma prime jeunesse, il avait des petits coureurs en métal ou en plastique, et on faisait un jeu de l’oie sur des planches sur lesquelles je dessinais des cases. Evidemment, ca laisse des séquelles. Evidemment aussi, un jeu qui simule le vélo m’ennuierait également. L’article donne envie, mais je ne sais pas si je suis prêt à sauter le pas, j’ai déjà un jeu de boxe (jeu pour deux ;)) qui demande aussi de gérer sa main pour doser son énergie et ses dégâts, j’ai peur que ca fasse redite. Après, ca permet de jouer à plus de deux, mais est ce vraiment ce que j’ai envie de sortir dans des joueurs viennent à la maison ?

    Merci pour l’article en tout cas.

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    1. Cher monsieur tnn,
      Pour je ne sais quelle raison votre commentaire était resté coincé dans les indésirables.
      Flamme Rouge chez nous est un jeu qui n’est sorti que dans un cadre familial. Entre adultes et enfants, sur trois générations, avec les grands-parents ; ce n’est pas rien quand même ! C’est aussi ça le jeu de société. Pour dire juste, je crois que pour nous tous le jeu de société ça a d’abord et fondamentalement été ça.
      Flamme Rouge fera peut-être partie de ces jeux qui auront marqué la mémoire de mes enfants. Comme La bonne paye et Hotel en leur temps dans ma jeunesse à moi, avec des souvenirs de visages familiaux autour de la table.

      Allez, on continue de creuser encore un peu la nostalgie. Moi aussi je jouais avec des petits cyclistes en métal ou en plastique, avec mon frère aîné quand j’étais marmot. Nous, on ne faisait pas ça sur une planche avec des cases, mais on contruisait un circuit dans un bac à sable chez mes grands-parents, et on déplaçait les coureurs en leur faisant suivre la trajectoire d’une bille dans laquelle on donnait une pichenette. Attention à ne pas faire sortir la bille du circuit, sinon c’était un tour perdu avec faire du sur-place.

      Je crois voir de quel jeu il s’agit, ton jeu de boxe. Il y avait En Garde, dans le même genre, un jeu de duel à l’épée, avec – de mémoire – attaques, feintes et parades.
      Flamme Rouge est plutôt à comparer à Ave Cesar, le jeu de course de chars. Ce sont des bons jeux tout ça.

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